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Un stage de formation ou un projet social ?

septembre 1998, par Loïc Dayot

Article après une expérience d’organisation lors d’un stage de formation d’animateurs scientifiques. Paru dans " Jeux d’école " de l’association Planète sciences fin 1998.

Au début du stage, tout commence par une réunion de 10 minutes durant lesquelles j’annonce que chacun des présents sera personne ressource...

Mauvais début d’article traditionnel pour raconter un stage peu conventionnel... Comment expliquer le fonctionnement d’un stage par écrit, alors que mes tentatives de le faire par oral sont restées vaines. C’est pourtant ce que me demande Laurence pour “ Jeux d’école ”. Mission impossible... on va voir ça dans quelques lignes.

Et pour commencer, on ne peut pas vraiment expliquer le fonctionnement du stage, encore moins son contenu. Il faut que j’arrive à décrire l’esprit du stage. L’entreprise est encore plus difficile. Je vais caricaturer à outrance (ne t’en offusque pas, chère lectrice, cher lecteur).

Tout est affaire de projet, d’apprentissages et de statut des acteurs.

Partons d’un “ enseignement traditionnel ”, c’est le plus simple. Ce qui est visé, ce sont directement les apprentissages, en délivrant directement les contenus aux acteurs, considérés comme des élèves passifs. Le maître transmet le savoir par le cours magistral (enseignement des jésuites) ou bien par un conditionnement (Skinner). Ca marche très bien pour des apprentissages de surface (des connaissances brutes), c’est aussi très économique, mais pas question de demander aux élèves des transferts dans d’autres contextes que celui de la “ classe ”. Évidemment, l’évaluation est assez simple et porte sur les acquis bruts des élèves.

Dans l’“ Ecole nouvelle ”, on oublie l’enseignement pour l’apprentissage. L’objectif est toujours l’acquisition de connaissances, par le biais d’activités (pédagogie active de Dewey, Montessori, Decroly, Freinet). La pédagogie de projet vient supporter ces activités en leur donnant un sens. Le projet est donc un prétexte. Les acteurs sont actifs dans leur développement. Pour simplifier beaucoup, les pratiques de Sciences Techniques Jeunesse sont à ranger dans ces conceptions de l’éducation. Les connaissances des apprenants peuvent être plus profondes, mais ça prend du temps et beaucoup de moyens. Les résultats sont convaincants et surtout l’apprentissage beaucoup plus naturel et agréable. On préfèrera viser l’éducabilité (apprendre à apprendre) ; l’évaluation des acquis est délicate, mais aussi moins importante. Les adeptes (dont nous sommes) pensent, espèrent que les transferts s’effectuent plus facilement.

Le projet de formation reposait sur un autre esprit. Le projet est proposé pour lui-même, pas pour les apprentissages qu’il occasionnera. Plus question alors de tenter d’évaluer les acquis. La seule chose que l’on évalue, c’est la réussite du projet. Mais pourquoi le projet ? Parce qu’il permet d’accorder aux acteurs un statut social : une personne autonome, active et responsable. Pour cela, bien entendu, il ne faut pas parler d’élève ou d’apprenant (personne qui a encore à apprendre), ni lui donner ce rôle. Pas question d’obliger les acteurs à apprendre, ni à préparer des séquences d’apprentissage mine de rien (petite provocation à l’égard de la progression par phase et le crypto-dogmatisme). Tout naturellement, les enseignants ne doivent pas avoir un statut à part des autres acteurs. Pour continuer dans la caricature, quand il y a un maître, il y a des élèves “ infantiles ” qui savent qu’ils ne savent pas et que le maître sait. Les formateurs du stage de septembre avaient le même statut que tout le monde : acteurs et personnes ressources, ils participaient pleinement aux travaux. Sauf qu’ils avaient préparé et choisi le projet de formation... ce n’est malheureusement pas une mince singularité !

Bref, le stage s’est construit autour de deux projets à réaliser par groupe. Le premier était la réalisation d’un projet scientifique ou technique (étude ou réalisation) et l’autre la construction et rédaction d’un projet d’animation, chacun sur la base d’un cahier des charges définit à l’avance. Pour les aider, tous les groupes avaient à leur disposition un ensemble de guide méthodologique. Les ressources étaient très importantes (mais autant qu’il aurait fallu sans doute) :
 Les lieux et le temps disponibles.
 Les livres, les documentations et les articles sur l’école, sur les programmes, sur l’animation générale ou scientifique et technique, sur les connaissances et trucs scientifiques et techniques...
 Le matériel : outillage, informatique, matériaux...
 Enfin et surtout les personnes ressources, c’est-à-dire tout le monde, qui avaient toutes des informations disponibles pour les autres.

Ça va de soit, il n’a pas été question de séquences. Chacun des groupes était libre d’organiser ses rythmes de travail, son emploi du temps. Aucune obligation de contenu, pas d’interro surprises en perspective. Et pourtant, la documentation a été grandement exploitée, le stage très dense, presque épuisant.

Pour ne rien gâcher, un coin d’exposition de l’avancée des travaux s’est improvisé, les repas et toutes les tâches étaient préparés par qui voulait bien, ce qui a donné une belle ambiance.

A l’issue de cette expérience, les avis sont partagés de la part des stagiaires. Il y a eu beaucoup de doutes sur les compétences des animateurs et leur autonomie dans les ateliers scolaires... normal, ce n’était pas le soucis lors de l’élaboration du projet de formation.
Mon espoir est que cette expérience se renouvelle dans de meilleures conditions encore. La nouveauté appelle un rodage avant de déterminer la pertinence. J’espère qu’elle suscitera des réactions constructives.

Mon doute, c’est que cet article soit aussi incompréhensible que mes explications orales...

Loïc 1998.

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